CBG, CBN, CBC, HHC … Notre industrie voit constamment apparaître de nouveaux cannabinoïdes, et c’est d’ailleurs ce qui rend notre métier si intéressant ! Aujourd’hui, notre loupe se pose au-dessus de la Cannabidivarine (CBDV), un cannabinoïde sans effets psychotropes – et légal – qu’il est déjà possible d’apprécier chez certaines variétés de fleurs de chanvre ainsi que dans la composition d’huiles enrichies en CBDV.
La CBDV est l’un des quelque 120 phytocannabinoïdes du cannabis. On la trouve – en faibles quantités – dans toutes les variétés, mais les Indicas seraient davantage concentrées que les Sativas. Il semblerait par ailleurs que la CBDV soit mieux synthétisée dans les fleurs dont le taux de THC est faible, et celui de CBD élevé. Pour autant, le lien biochimique entre CBD et CBDV reste lacunaire.
La grande majorité des cannabinoïdes descendent du Cannabigerol (CBG), et l’on est pratiquement certain que c’est également le cas de la CBDV. En revanche, on ne connaît pas encore les rouages du processus de sa synthèse.
Ce que l’on sait, c’est que CBD et CBDV partagent une structure moléculaire similaire, raison pour laquelle ces deux cannabinoïdes non-psychoactifs sont candidats pour traiter les mêmes familles de maladies.
Pour autant, CBD et CBDV sont bel et bien deux molécules distinctes, puisqu’elles diffèrent d’un atome de carbone. Cela peut paraître minime, mais cette chaine carbone détermine en partie les récepteurs de notre système endocannabinoïde avec lesquels la CBDV a une affinité. Nous y reviendrons.
Quoi qu’il en soit, avec sa chaîne de carbone propyle, la CBDV appartient à la famille des « Varin Cannabinoïd » au sein de laquelle l’on trouve également le THCV, le CBGV, ou encore le CBCV parmi d’autres. La CBDV n’est donc pas si atypique que ça !
La CBDV, comme tous les autres cannabinoïdes, a été découverte au début des années 70, mais ce n’est que très récemment que le corps scientifique a le droit de se pencher sérieusement sur ses potentielles propriétés.
Le célèbre laboratoire britannique GW Pharmaceutical s’est d’ailleurs montré particulièrement intéressé, notamment pour le développement d’un traitement à base de CBDV pour soigner l’épilepsie. À cette occasion, les études menées (1) ont montré son innocuité, ainsi que l’absence d’effets secondaires, même lorsque les essais ont été réalisés avec des doses maximales.
La CBDV – tout comme le CBD et tous les cannabinoïdes – est inoffensive pour l’humain, sans effets psychotropes (sauf le THC) et potentiellement pleine de vertus thérapeutiques.
Tous les cannabinoïdes agissent – de manière plus ou moins directe – avec notre système endocannabinoïde (SEC). C’est d’ailleurs pour cette raison que le cannabis est une plante médicinale aux mille vertus. En effet – pour faire un bref rappel – le SEC est un vaste réseau de récepteurs répartis à des points stratégiques de notre organisme, de manière à le maintenir en état d’homéostasie.
Le célèbre duo THC/CBD agit – chacun à leur manière – sur les deux principaux types de récepteurs du SEC, à savoir CB1 et CB2. La CBDV, quant à elle, ne semble pas montrer une affinité particulière avec ces neurorécepteurs-là. En revanche, les recherches préliminaires semblent indiquer qu’elle se fixe sur les récepteurs TRPV.
Nous verrons un peu plus loin ce que cela implique d’un point de vue médical, mais pour le consommateur lambda, la CBDV pourrait aider en cas de :
👉 Raideurs et contractures musculaires ;
👉 Douleurs chroniques ;
👉 Maux de tête et migraines.
BON A SAVOIR
Les récepteurs TRPV sont des capteurs sensoriels situés dans les tissus musculaires, au niveau de l’épiderme et en partie dans le système nerveux central. Ils envoient un message nerveux au cerveau et déclenchent la réaction inflammatoire en réponse à un stimulus de type thermique.
Il faut savoir que le CBD agit lui aussi sur les récepteurs TRPV de notre organisme. En cela, les deux cannabinoïdes présentent des propriétés similaires.
Toutefois, l’affinité du CBD avec les récepteurs CB1 et CB2 le rend davantage efficace pour traiter des maux tels que l’insomnie, le stress et l’anxiété, tandis que la CBDV serait plus utile pour soigner les maux liés aux douleurs nociceptives comme celles susmentionnées un peu plus tôt.
En parallèle, des recherches ont montré un autre phénomène biologique intéressant : la CBDV serait en effet capable de réguler la synthèse d’AG-2, l’un des deux cannabinoïdes produits au sein de notre organisme.
BON A SAVOIR
Notre organisme produit naturellement et spontanément deux endocannabinoïdes : l’AG-2 et l’Anandamide. Ensemble, ils agissent sur notre SEC et travaillent à maintenir les fonctions physiologiques de notre corps dans un état d’équilibre optimal.
Le fonctionnement de l’Anandamide – qui signifie « béatitude » en sanskrit – est mieux connu que celui de l’AG-2. Toutefois, l’on sait que cet endocannabinoïde peut se fixer sur les récepteurs de type CB1.
Ces récepteurs-là sont principalement localisés au niveau de notre système nerveux central – le cerveau – et donc, indirectement, la CBDV pourrait se montrer bénéfique en cas de :
👉 Stress ;
👉 Anxiété ;
👉 Insomnie ;
👉 État dépressif.
On comprend assez aisément les processus mobilisés par la CBDV pour induire une augmentation de la synthèse d’AG-2 : en fait, la CBDV interfère avec la production de l’enzyme nécessaire à la synthèse de l’AG-2, la diacylglycérol lipase.
Malgré tout, il reste difficile de savoir dans quelle mesure les vertus mentionnées peuvent être ressenties par les consommateurs.
Comme mentionné, les laboratoires GW pharma se sont intéressés de très près aux potentielles applications thérapeutiques de la CBDV. Leurs recherches ont commencé au début des années 2000 et portaient avant tout sur le développement d’un traitement pour soigner l’épilepsie.
BON A SAVOIR
GW Pharmaceuticals – devenu Jazz Pharmaceuticals – est un nom connu dans l’industrie, car il ne s’agit ni plus ni moins du laboratoire qui a développé le premier traitement à base d’huile de cannabis approuvé par la FDA. L’Epidiolex, qui contient essentiellement du CBD, constitue aujourd’hui encore un traitement efficacement pour diminuer le nombre et l’intensité des crises provoquées par certaines formes d’épilepsie.
Au cours de l’année 2015, les laboratoires GW ont obtenu l’accord des autorités compétentes pour le dépôt de brevet d’un nouveau médicament à base de cannabis pour traiter l’épilepsie, le GWP42006. Cette fois-ci, l’ingrédient principal n’est pas le CBD, mais bien la CBDV.
C’est dans le cadre des études de développement de ce traitement que les chercheurs ont démontré l’innocuité du cannabinoïde. Ils ont également pu montrer que la CBDV – via son lien indirect avec les récepteurs CB1 – est capable de réduire l’intensité des crises d’épilepsie induites par trois formes que le CBD ne peut pas traiter.
Des études complémentaires sont nécessaires pour mieux comprendre la propriété anticonvulsionante de la CBDV et ainsi développer un traitement. Jusqu’à présent, les tests effectués ne concernent que les rongeurs.
Quoi qu’il en soit, ces observations ont permis d’ouvrir la voie vers d’autres maladies orphelines de traitement.
La dystrophie musculaire de Duchenne est une maladie génétique qui provoque la dégénérescence progressive des muscles.
Comme nous l’avons expliqué un peu plus tôt, la CBDV est capable de se fixer sur les récepteurs TRPV, lesquels, rappelons-le, se trouvent entre autres au niveau des tissus musculaires. Les études (2) – menées pour l’instant sur des rats – ont effectivement montré que la CBDV est capable d’augmenter la mobilité, tout en réduisant la raideur des muscles induite par la maladie.
Soulignons que cette étude – et ses résultats encourageants – ne concerne pas uniquement la CBDV, mais aussi le CBD. Le CBD, que de nombreuses personnes aiment consommer après une séance de sport, pour favoriser la récupération musculaire.
Cette maladie neurologique affecte les fonctions cérébrales. Parmi les symptômes – qui apparaissent dès les premiers mois de vie, exclusivement chez les petites filles – : des crises d’épilepsie, des troubles moteurs, ainsi qu’une déficience intellectuelle sévère.
De par son affinité avec les récepteurs CB1 – essentiellement présents dans le cerveau – ainsi que les résultats prometteurs observés lors des essais portant sur l’épilepsie, la CBDV constitue une candidate toute trouvée pour la formulation d’un traitement. Effectivement, les observations (3) tendent à confirmer cette hypothèse : les souris traitées avec de la CBDV ont retrouvé un peu de leur mobilité et de leurs autres fonctions cognitives.
Toutefois, comme c’est le cas pour toutes les études dont nous parlons ici, la compréhension des processus physiologiques qui entrent en jeu reste lacunaire.
Le syndrome de Rett est parfois considéré comme une forme d’autisme. Se faisant, les observations susmentionnées ont jeté les bases pour étudier les potentiels bienfaits de la CBDV sur les personnes atteintes de TSA. Et les conclusions sont tout aussi encourageantes.
Encore une fois, on vous épargne les détails techniques – et fastidieux – de l’étude (4) en question (mais n’hésitez pas à aller la consulter), simplement, le cerveau d’une personne atteinte de TSA est passé au scanner après qu’elle ait pris de la CBDV, et les scientifiques ont pu observer que les niveaux d’une des protéines responsables de la mauvaise communication entre les neurones (GABA) avaient tendance à baisser dans certaines zones (notamment la zone préfrontale).
En somme, il semblerait bien que la CBDV puisse améliorer les fonctions cognitives, mais il faudra attendre de plus amples données avant qu’un traitement ne voit le jour.
Au vu de son innocuité et de son caractère non psychotrope, la CBDV a toutes ses chances sur le marché des produits à base de chanvre. Et d’ailleurs, l’on voit déjà apparaître des huiles enrichies en CBDV ainsi que des variétés de fleurs spécialement crées pour favoriser la synthèse du phytocannabinoïde.
Au vu de son innocuité et de son caractère non psychotrope, la CBDV a toutes ses chances sur le marché des produits à base de chanvre. Et d’ailleurs, l’on voit déjà apparaître des huiles enrichies en CBDV ainsi que des variétés de fleurs spécialement crées pour favoriser la synthèse du phytocannabinoïde.
Ceci étant dit, rappelons que ce cannabinoïde est naturellement présent en très petites quantités dans les fleurs. Son extraction est donc coûteuse, et développer des produits concentrés en CBDV risque ainsi d’être complexe…
Pour l’instant, la meilleure façon de profiter des effets de la CBDV reste sans doute les fleurs concentrées en CBDV. La célèbre banque de graines hollandaise – Dutch Passion – serait d’ailleurs la toute première à avoir proposé une telle variété. Sa CBD-Victory affiche un taux de CBDV et de CBD similaires, compris entre 4 et 6% l’un et l’autre.
Pendant ce temps, dans les serres de Green Exchange, les premières fleurs concentrées en CBDV sont sur le point d’être cueillies ! Nous vous en dirons plus dès que ces petites pépites seront prêtes à être dégustées.
(1) Cannabidivarin-rich cannabis extracts are anticonvulsant in mouse and rat via a CB1 receptor-independent mechanism (2) Effects of non-euphoric plant cannabinoids on muscle quality and performance of dystrophic mdx mice (3) Chronic treatment with the phytocannabinoid Cannabidivarin (CBDV) rescues behavioural alterations and brain atrophy in a mouse model of Rett syndrome (4) Effects of cannabidivarin (CBDV) on brain excitation and inhibition systems in adults with and without Autism Spectrum Disorder (ASD): a single dose trial during magnetic resonance spectroscopy